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Les psaumes - Paraphrases multiples rss

Premier exemple : le Beatus Vir :

Commençons par une version classique et actuelle du Psaume Premier. Il s’agit du Beatus Vir de la bible latine, la Vulgate. Ce texte est comme un encouragement à l’ensemble des psaumes suivants. Nous ne prendront que les trois premiers versets : 
1- Heureux l'homme qui ne marche pas selon le conseil des méchants, et qui ne se tient pas dans la voie des pécheurs, et qui ne s'assied pas au banc des moqueurs;
2- Mais qui prend son plaisir dans la loi de l'Éternel, et médite sa loi jour et nuit.
3- Il sera comme un arbre planté près des eaux courantes, qui rend son fruit dans sa saison et dont le feuillage ne se flétrit point; et dans tout ce qu'il fait, il réussira.

Voici les paraphrases qui en résultent. L’orthographe de l’époque est conservée :


Clément Marot

Clement Marot.png

Valentin Conrart

Valentin Conrart.png
 

ARGUMENT : Ce pseaume chante, que ceulx sont bien heureulx, qui regrettans les meurs, et le conseil des maulvais, s’adonnent à cognoistre, et mettre à effect, la Loy de Dieu : et malheureux ceulx, qui font au contraire. Chose propre pour consoler les bons.

Qui au conseil des malings n’a esté,
Qui n’est au trac des pécheurs arresté,
Qui des mocqueurs au banc place n’a prise :
Mais nuict, et jour, la Loy contemple, et prise
De l’Eternel, et en est désireux :
Certainement cestuy là est heureux.
Et si rien semblable à l’arbrisseau
Planté au long d’un clair courant ruisseau,
Et qui son fruict en sa saison apporte,
Duquel aussi la fueille ne chet morte :
Si qu’ung tel homme, et tout ce qu’il fera,
Toujours heureux, et prospere sera.

Version Marot – de Bèze


Heureux celui qui, dès ses jeunes ans,
S'est tenu loin du conseil des méchants,
Qui des pécheurs fuit la trompeuse voie,
Et des moqueurs la criminelle joie;
Qui craignant Dieu, ne se plaît qu'en sa Loi,
Et, nuit et jour, la médite avec foi.
Tel que l'on voit, sur le bord d'un ruisseau,
Croître et fleurir un arbre toujours beau,
Et qui ses fruits en leur saison rapporte,
Sans que jamais la feuille tombe morte;
Tel est le juste, et tout ce qu'il fera,
Béni d'en haut, toujours prospérera

Version Conrart-La Bastide

Ici Conrart  fluidifie le style qui est propre à Marot.

Deuxième exemple : le Sicut servus, psaume 42


Voici une version d'aujourd'hui  :
2 Comme un cerf altéré
cherche l'eau vive,
ainsi mon âme te cherche
toi, mon Dieu.
3 Mon âme a soif de Dieu,
le Dieu vivant ;
quand pourrai-je m'avancer,
paraître face à Dieu ?
4 Je n'ai d'autre pain que mes larmes,
le jour, la nuit,
moi qui chaque jour entends dire :
'' Où est-il ton Dieu ? ''

Théodore de Bèze

Theodore de Beze.png

Valentin Conrart

Valentin Conrart.png


Ainsi qu’on oit le cerf bruire,
Pourchassant le frais des eaux :
Ainsi mon cœur qui souspire,
Seigneur emprès tes ruisseaux,
Va tousjours criant suivant
Le grand, le grand Dieu vivant.
Héla donques, quand sera-ce
Que verray de Dieu la face…

Version Marot-Bèze


Comme un cerf altéré brame,
Après le courant d’eaux,
Ainsi soupire mon âme,
Seigneur, après tes ruisseaux :
Elle a soif du Dieu vivant ;
Et s’écrie, en le suivant,
Mon Dieu, mon Dieu, quand sera-ce,
Que mes yeux verront ta face ?
Pour pain je n’ai que mes larmes,
La nuit, le jour, en tout lieu,
Lorsqu’en mes dures alarmes,
On me dit, que fait ton Dieu ?

Version Conrart-La Bastide


Troisième exemple, le psaume 51 dit Miserere, psaume pénitentiel

Nous comparons ici deux paraphrases contemporaines, émanant de deux amis proches : Conrart et Drelincourt.

Laurent Drelincourt

drelincourt.png

Valentin Conrart

Valentin Conrart.png


Grace ! Grace ! Pardon, souverain Roi des cieux,
Efface mes forfaits par ta haute clémence,
Fais-moi sentir l’effet de ta douceur immense,
Et prends quelque pitié d’un pêcheur odieux :
C’est en toi seul, mon Dieu, que mon espoir se fonde.
Ne m’abandonne pas dans ce pressant besoin,
Mais lave mille fois, et relave avec soin,
De mon sale péché la tache trop profonde.

Version Drelincourt

 


Miséricorde et grâce, ö Dieu des cieux,
Un grand pécheur implore ta clémence ;
Use en ce jour de ta douceur immense,
Pour effacer mes crimes odieux.
Oh ! lave-moi, lave-moi tout entier ;
De mon péché la tache est si profonde !
Toi seul, Seigneur, tu peux me nettoyer :
Sur ta bonté tout mon espoir se fonde.

Version Conrart-La Bastide

 


Ces deux paraphrases ont été écrites en pleine connaissance du texte de Clément Marot. C’est pourquoi nous le donnons ci-après :

Misericorde au povre vicieux,
Dieu tout puissant, selon ta grand'clemence,
Use à ce coup de ta bonté immense,
Pour effacer mon faict pernicieux.
Lave moy, Sire & relave bien fort,
De ma commise iniquité mauvaise:
Et du péché, qui m'ha rendu si ord,
Me nettoyer d'eau de grace te plaise

Clément Marot
 
La paraphrase des psaumes a permis de redonner une actualité renouvelée aux textes. Ainsi, Le contenu, a pu passer dans le langage commun, comme certains proverbes.
Les Réformés ont anticipé sur les traductions nécessaires au christianisme : dès le 17e siècle, l’Eglise catholique s’est moins méfiée des traductions de la Sainte Ecriture, et a autorisé la réécriture des psaumes sur le mode de la paraphrase.
Enfin, la paraphrase a donné des ailes aux esprits désireux d’une traduction moins littérale et plus poétique. De ce fait, elle a préparé les esprits à la sensibilité baroque, ou l’expérience émotionnelle compte davantage que la description.

                                                                                                           Thierry  BOBINET
 

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